Justine Testo

On la voyait passer toujours Pliݩe en deux
Sous le poids d'un fagot mais plus souvent de deux
On la voyait passer le matin et le soir
Les cheveux bien tirݩs, toujours vݩtue de noir
Du haut de mes dix ans je la trouvais plus vieille
Que ce tronc d'olivier ces rameaux de la treille
Mais j'entendais ma mݨre du fond de la cuisine
Crier, crier, crier
Bonjour, bonjour Justine

Elle habitait lÝ -bas la plus vieille maison
Celle qui se confond au bleu de l'horizon
Barricadݩe chez elle comme dans un chݢteau fort
Elle comptait ses jours comme on compte un trݩsor

Du haut de mes quinze ans je la trouvais si laide
Avec ses pieds immenses et sa dݩmarche raide
Mais j'entendais ma mݨre du fond de la cuisine
Crier, crier, crier
Bonjour bonjour Justine

Un matin dans la rue on ne l'entendit pas
Mais quelques jours plus tard on a sonnݩ le glas
Elle Ý©tait morte seule Ý  quatre vingt dix ans
On meurt seule ݠ cet ݢge mݪme entourݩe d'enfants

Du haut de mes trente ans c'est brisݩ quelque chose
Comme l'on se dݩgrise quand le ciel se fait rose
Je n'avais plus ma mݨre au fond de la cuisine
Et c'est moi qui criait
Adieu, adieu Justin